dimanche 24 novembre 2013



...Ce sont les plus bas instincts qui stimulent les hommes du Kali Yugä. Ils choisissent de préférence les idées fausses. Ils n'hésitent pas à persécuter les sages. L'envie les tourmente. La négligence, la maladie, la faim, la peur se répandent. Il y aura de graves sécheresses. Les différentes régions des pays s'opposent les unes aux autres...
Les livres sacrés ne sont plus respectés. Les hommes seront sans morale, irritables et sectaires. Dans l'âge de Kali se répandent de fausses doctrines et des écrits trompeurs...
On tuera les fœtus dans le ventre de leur mère et on assassinera les héros. Les Shudrâ prétendront se comporter comme des Brahmanes et les prêtres comme des ouvriers...
Des hommes qui ne possèdent pas les vertus des guerriers deviennent rois... Des savants seront au service d'hommes médiocres, vaniteux et haineux... Il y aura beaucoup de personnes déplacées, errant d'un pays à un autre... Les commerçants feront des opérations malhonnêtes. Ils seront entourés de faux philosophes prétentieux. Il y aura beaucoup de mendiants et de sans-travail. Tout le monde emploiera des mots durs et grossiers. On ne pourra se fier à personne. Les gens seront envieux. Nul ne voudra réciproquer un service rendu. La dégradation des vertus et la censure des puritains hypocrites et moralisateurs caractérisent la période de la fin du Kali. Il n'y aura plus de rois..."
 (Lingä Purânä : chap.40)

 "Les gens du Kali Yugä prétendront ignorer les différences des races et le caractère sacré du mariage (qui assure la continuité d'une race), la relation de maître à élève... Les hommes ne chercheront qu'à gagner de l'argent, les plus riches détiendront le pouvoir. Ceux qui posséderont beaucoup d'éléphants, de chevaux et de chars seront rois. Les gens sans ressources seront leurs esclaves...
Les chefs d'états ne protégeront plus le peuple mais, au moyen d'impôts, s'approprieront toutes les richesses. Les agriculteurs abandonneront leurs travaux de labours et de moissons pour devenir des ouvriers non spécialisés et prendront les moeurs des hors-castes. Beaucoup seront vêtus de haillons, sans travail, dormant par terre, vivant comme des miséreux...
Des gens souffrant de la sécheresse se nourriront de bulbes et de racines. Ils seront sans joies et sans plaisirs. Beaucoup se suicideront. Souffrant de famine et de misère, tristes et désespérés, beaucoup émigreront vers les pays où poussent le blé et le seigle...
Les hommes de peu d'intelligence, influencés par des théories aberrantes, vivront dans l'erreur. Ils demanderont à quoi bon ces dieux, ces prêtres, ces livres saints, ces ablutions ? "
(Vishnu Purânä : Livre VI, chap.1)

mercredi 20 novembre 2013













































Un enfant de choeur parut, précédant un vieux prêtre et, pour la première fois, Durtal vit servir réellement une messe, comprit l'incroyable beauté que peut dégager l'observance méditée du sacrifice. Cet enfant agenouillé, l'âme tendue et les mains jointes, parlait, à haute voix, lentement, débitait avec tant d'attention, avec tant de respect, les répons du psaume, que le sens de cet admirable liturgie, qui ne nous étonne plus, parce que nous ne la percevons depuis longtemps que bredouillée et expédiée, tout bas, en hâte, se révéla brusquement à Durtal. Et le prêtre, même inconsciemment, qu'il le voulût ou non, suivait le ton de l'enfant, se modelait sur lui, récitait avec lenteur, ne proférant plus simplement les versets du bout des lèvres, mais il se pénétrait des paroles qu'il devait dire, haletait, saisi, comme à sa première messe, par le grandeur de l'acte qu'il allait accomplir. Durtal sentait, en effet, frémir la voix de l'officiant, debout devant l'autel, ainsi que les Fils même qu'il représentait devant le Père, demandant grâce pour tous les péchés du monde qu'il apportait, secouru, dans son affliction et dans son espoir, par l'innocence de l'enfant dont l'amoureuse crainte était moins réfléchie que la sienne et moins vive. Et lorsqu'il prononçait cette phrase désolée: "Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi mon âme est-elle triste et pourquoi me troublez-vous?" le prêtre était bien la figure de Jésus souffrant sur le Calvaire, mais l'homme restait aussi dans le célébrant, l'homme faisant retour sur lui-même et s'appliquant naturellement, en raison de ses délits personnels, de ses propres fautes, les impressions de détresse notées par le texte inspiré du psaume.

mardi 20 août 2013

" Au lieu de méditer la vie [des apôtres, martyrs et autres saints], pour suivre leur exemple, [le monde] a mis toute son étude à contempler et tenir comme trésor leurs os, chemises, ceintures, bonnets, et semblables fatras. Si on voulait ramasser tout ce qui s'est trouvé [de pièces de la vraie croix], il y en aurait la charge d'un bon grand bateau. Quelle audace a-ce été de remplir la terre de pièces de bois en telle quantité que trois cents hommes ne les sauraient porter !

Quel sacrilège est-ce, d'abuser ainsi du nom de Jésus-Christ, pour couvrir des fables tant froidement forgées ? [On a beau faire].. tout cela ne fait rien pour approuver que Jésus-Christ ait été crucifié avec quatorze clous, ou qu'on eût employé une haie tout entière à lui faire sa couronne d'épines; ou qu'un fer de lance en ait enfanté, depuis, trois autres; ou que d'un suaire seul il en soit sorti une couvée, comme de poussins d'une poule. Ils n'ont point eu honte de feindre une relique de la queue de l'âne sur lequel notre Seigneur fut porté, ils la montrent à Gènes. Mais il ne nous faut étonner non plus de leur impudence, que de la sottise et stupidité du monde, qui a reçu avec dévotion une telle moquerie.


Si on leur eût montré des crottes de chèvres, et qu'on leur eût dit : voici des patenôtres (chapelets) de Notre Dame, ils les eussent adorées sans contredit.

L'abbaye de Charroux, au diocèse de Poitiers, se vante d'avoir le prépuce, c'est-à-dire la peau qui lui fut coupée à la circoncision. L'Evangéliste saint Luc raconte bien que notre Seigneur Jésus a été circoncis; mais que la peau ait été gardée, pour la réserver en relique, il n'en fait point de mention. Que dirons-nous du prépuce qui se montre à Rome, à Saint-Jean de Latran ? Il est certain que jamais il n'y en a eu qu'un... un troisième prépuce de notre Seigneur, se montre à Hildesheim.

Il n'y a si petite villette ni si méchant couvent, où l'on ne montre du lait de la sainte Vierge, les uns plus, les autres moins. Tant y a que si la sainte Vierge eût été une vache, ou qu'elle eût été une nourrice toute sa vie, à grand peine en eût-elle pu rendre telle quantité. D'autre part, je demanderais volontiers comment ce lait, qu'on montre aujourd'hui partout, s'est recueilli pour le réserver en notre temps. Il est bien dit que les bergers ont adoré Jésus-Christ, que les mages lui ont offert leurs présents; mais il n'est point dit qu'ils aient rapporté du lait pour récompense.

Les dernières reliques qui appartiennent à Jésus-Christ : un morceau du poisson rôti que lui présenta saint Pierre, quand il lui apparut sur les bords de la mer. Il faut dire qu'il a été bien épicé, ou qu'on y ait fait un merveilleux saupiquet, qu'il s'est pu garder si longtemps. Mais, sans risée, est-il à présumer que les apôtres aient fait une relique du poisson qu'ils avaient apprêté pour leur dîner?

partout où il y a église qui porte les noms [de Saint Pierre ou Saint Paul], il y en a des reliques. Si on demande quelles, qu'on se souvienne de la cervelle de saint Pierre qui était au grand autel de cette ville [de Genève]. Tout ainsi qu'on trouva que c'était une pierre de ponce, ainsi trouverait-on beaucoup d'os de chevaux ou de chiens, qu'on attribue à ces deux apôtres. Ainsi en est-il des reliques : tout y est si brouillé et confus, qu'on ne saurait adorer les os d'un martyr qu'on ne soit en danger d'adorer les os de quelque brigand ou larron, ou bien d'un âne, ou d'un chien, ou d'un cheval.

On ne saurait adorer un anneau de Notre-Dame, ou un sien peigne, ou ceinture, qu'on ne soit en danger d'adorer les bagues de quelque paillarde (prostituée).

Le principal serait d'abolir entre nous chrétiens cette superstition païenne, de canoniser les reliques, tant de Jésus-Christ que de ses saints, pour en faire des idoles. "

Morceaux choisis du Traité des Reliques, par Calvin.



vendredi 21 juin 2013

« La liberté, c'est la possibilité de s'isoler. Tu es libre si tu peux t'éloigner des hommes sans que t'obligent à les rechercher , le besoin d'argent, ou l'instinct grégaire, l'amour, la gloire ou la curiosité, toutes choses qui ne peuvent trouver d'aliment dans la solitude ou le silence. S'il t'est impossible de vivre seul, c'est que tu es né esclave. Tu peux bien posséder toutes les grandeurs de l'âme ou de l'esprit : tu es un esclave noble, ou un valet intelligent, mais tu n'es pas libre. »


jeudi 6 juin 2013

"Vous commencez par faire l'éloge de l'intelligence et de la solidarité de la classe ouvrière et l'instant d'après vous expliquez qu'ils sont trop idiots pour distinguer leurs propres intérêts d'une pub pour une lessive et qu'il faut les politiser manu militari. A vous entendre, on les prendrait pour des demeurés."

mardi 4 juin 2013

« Le vice principal de toute société égalisatrice est l’Envie…

Et la grande vertu de toutes les aristocraties, me semble-t-il, on la trouve dans le fait que les gens savent toujours qui ils sont et donc ne se comparent pas aux autres.

Cette permanente comparaison est vraiment la quintessence de la vulgarité. Qui ne possède pas cette hideuse habitude se voit immédiatement accuser d’arrogance, comme si, en ne se comparant pas, on se plaçait d’autorité au sommet. »



samedi 1 juin 2013

« L’homme d’autrefois ne ressemblait pas à celui d’aujourd’hui. Il n’eût jamais fait partie de ce bétail que les démocraties ploutocratiques, marxistes ou racistes, nourrissent pour l’usine ou le charnier. Il n’eût jamais appartenu aux troupeaux que nous voyons s’avancer tristement les uns contre les autres, en masses immenses derrière leurs machines, chacun avec ses consignes, son idéologie, ses slogans, décidés à tuer, résignés à mourir, et répétant jusqu’à la fin, avec la même résignation imbécile, la même conviction mécanique : « C’est pour mon bien … c’est pour mon bien… » Loin de penser comme nous, à faire de l’État son nourricier, son tuteur, son assureur, l’homme d’autrefois n’était pas loin de le considérer comme un adversaire contre lequel n’importe quel moyen de défense est bon, parce qu’il triche toujours. C’est pourquoi les privilèges ne froissaient nullement son sens de la justice ; il les considérait comme autant d’obstacles à la tyrannie, et, si humble que fût le sien, il le tenait – non sans raison d’ailleurs – pour solidaire des plus grands, des plus illustres. Je sais parfaitement que ce point de vue nous est devenu étranger, parce qu’on nous a perfidement dressés à confondre la justice et l’égalité. Ce préjugé est même poussé si loin que nous supporterions volontiers d’être esclaves, pourvu que personne ne puisse se vanter de l’être moins que nous. Les privilèges nous font peur, parce qu’il en est de plus ou moins précieux. Mais l’homme d’autrefois les eût volontiers comparés aux vêtements qui nous préservent du froid. Chaque privilège était une protection contre l’État. Un vêtement peut être plus ou moins élégant, plus ou moins chaud, mais il est encore préférable d’être vêtu de haillons que d’aller tout nu. Le citoyen moderne, lorsque ses privilèges auront été confisqués jusqu’au dernier, y compris le plus bas, le plus vulgaire, le moins utile de tous, celui de l’argent, ira tout nu devant ses maîtres. »







vendredi 24 mai 2013

"Lorsqu'en voyageant dans la presqu'île armoricaine on dépasse la région, plus rapprochée du continent, où se prolonge la physionomie gaie, mais commune, de la Normandie et du Maine, et qu'on entre dans la véritable Bretagne, dans celle qui mérite ce nom par la langue et la race, le plus brusque changement se fait sentir tout à coup. Un vent froid, plein de vague et de tristesse, s'élève et transporte l'âme vers d'autres pensées ; le sommet des arbres se dépouille et se tord ; la bruyère étend au loin sa teinte uniforme ; le granit perce à chaque pas un sol trop maigre pour le revêtir ; une mer presque toujours sombre forme à l'horizon un cercle d'éternels gémissements. Même contraste dans les hommes : à la vulgarité normande, à une population grasse et plantureuse, contente de vivre, pleine de ses intérêts, égoïste comme tous ceux dont l'habitude est de jouir, succède une race timide, réservée, vivant toute au dedans, pesante en apparence, mais sentant profondément et portant dans ses instincts religieux une adorable délicatesse."




mercredi 22 mai 2013

" Et des files de pèlerins se succèdent sans trêve. On prie Notre-Dame pour l'extension des affaires; on la supplie d'ouvrir de nouveaux débouchés aux saucissons et aux soies. On fait l'article à la Vierge; on la consulte sur les moyens de vendre des denrées défraîchies et d'écouler les pannes. Au centre de la ville même, dans l'église de Saint-Boniface, j'ai relevé une pancarte où l'on invite les fidèles à ne pas distribuer, par respect pour le Saint Lieu, d'aumônes aux pauvres. Il ne convenait pas, en effet, que les oraisons commerciales fussent troublées par les ridicules plaintes des indigents!

- Oui, dit Durtal, et ce qui est bien étrange aussi, c'est que la démocratie est l'adversaire le plus acharné du pauvre. La Révolution, qui semblait, n'est-ce pas, devoir le protéger, s'est montrée pour lui le plus cruel des régimes. Je te ferai parcourir un jour, un décret de l'an II; non seulement, il prononce des peines contre ceux qui tendent la main, mais encore contre ceux qui donnent! "



vendredi 17 mai 2013

« Je ne parle pas pour les faibles qui veulent obéir et tombent à bras raccourcis sur l'esclavage. En présence de la nature inexorable, nous sentons que nous sommes nous-mêmes partie de cette nature inexorable. Mais j'ai trouvé la force où on ne la cherche pas, chez des hommes simples, doux et obligeants, sans le moindre penchant à la domination - et inversement le goût de dominer m'est souvent apparu comme un signe de faiblesse intime ; ils craignent leur âme d'esclave et la drapent d'un manteau royal (ils finissent pas devenir esclaves de leurs partisans, de leur réputation, etc). Les natures puissantes règnent, c'est une nécessité, sans avoir besoin de lever le doigt, dussent-elles, de leur vivant, s'enterrer dans une chaumière. »



dimanche 12 mai 2013

samedi 4 mai 2013




« Mais il faut s'accrocher à cette vérité historique, la défendre contre l'actualité et l'apparence et n'en pas démordre : la noblesse européenne, -la noblesse du sentiment, du goût, des mœurs, bref la noblesse dans tous les sens élevés du mot,- est l’œuvre et l'invention de la France ; la vulgarité européenne, la médiocrité plébéienne des idées modernes est l’œuvre de l'Angleterre. »




« L'Ecriture Sainte témoigne que Notre Seigneur fit le Paradis terrestre, qu'il y mit l'arbre de vie et que de là sort une source d'où naissent en ce monde quatre fleuves principaux : le Gange aux Indes, le Tigre et l'Euphrate, lesquels séparent les montagnes, forment la Mésopotamie et coulent ensuite en Perse, et le Nil qui naît en Ethiopie et se jette dans la mer à Alexandrie. Je ne trouve pas ni n'ai jamais trouvé un écrit des Latins ou des Grecs qui, d'une manière certaine, dise en quel point de ce monde est le Paradis terrestre. Je ne l'ai vu non plus sur aucune mappemonde, sinon situé avec autorité d'argument. Certains le plaçaient là où sont les sources du Nil, en Ethiopie, mais d'autres parcoururent toutes ces terres et n'y trouvèrent ni la température ni l'élévation vers le ciel telles qu'ils pussent admettre qu'il était là et que les eaux du déluge y fussent arrivées qui le recouvrirent. [...] Je suis convaincu que là est le Paradis terrestre, où personne ne peut arriver si ce n'est par la volonté divine. »

Christophe Colomb, Troisième voyage aux Indes




jeudi 18 avril 2013

Le Fou magnifique

Je ne voudrais pas quitter cette cohorte de penseurs, d'écrivains et d'artistes solitaires sans évoquer Miguel de Cervantès (1547-1616) dont l'existence fut mêlée aux batailles et aux gloires de son siècle et qui inventa le personnage de Don Quichotte, raillé et incompris, si seul parmi la foule des bien-pensants.

Quand de nos jours on parcourt, non avec Rossinante mais avec des chevaux-vapeur, la longue, l'interminable plaine de la Manche, on comprends ici que le temps n'a guère plus de signification que dans un désert de sable. Tout peut surgir : le mirage (les moulins à vent devenant des combattants ennemis), l'épopée, l'indicible soif d'amour. Et il semble naturel qu'à ce désert d'Espagne s'accorde la figure ascétique et nomade de Don Quichotte, juché sur son cheval maigre.

« En el lugar de la Mancha... », « Dans une bourgade de la Manche, dont je ne veux pas me rappeler le nom... » Ainsi commence un des livres les plus énigmatiques et les plus fous de la littérature. Ce lieu que Cervantès ne tient pas à nommer s'appelle aujourd'hui Argamasillo el Alba et c'est en ce bourg innommable, autant dire infâme, qu'il fut emprisonné. C'est là aussi qu'il conçut son chef d’œuvre et en écrivit les premiers chapitres. A la manière dont Jean de la Croix avait pris son envol mystique à partir du cachot de Tolède, Cervantès imagina, dans cette sinistre geôle au cœur d'une plaine désespérante, une oasis pour se rafraîchir et se désaltérer. Jailli de son cerveau et de sa plume, l'ingénieux hidalgo passerait son temps à combattre l'injustice et secourir les faibles, à rêver, à aimer d'impossible amour une irréelle Dulcinée...

Soldat autant que poète, vaillant autant que cultivé, Cervantès a participé en 1571 à la bataille navale de Lépante où il perd l'usage de la main gauche. Quelques temps après, il est captif du roi d'Alger pendant cinq ans. De retour en Espagne, il écrit des poèmes et de nombreuses pièces de théâtre, malgré la rivalité de Lope de Vega. A partir de 1587 il commence une autre vie, il devient commissaire aux vivres puis collecteur d'impôts. A ce titre il parcourt l'Andalousie, la région de Séville puis de Grenade, la plaine interminable de la Manche. Il parle de blé, d'orge ; d'huile, de vin et d'olives avec les gens du peuple qu'il rencontre, qu'il rançonne sans doute. A plusieurs reprises, il est emprisonné et même excommunié pour des raisons diverses, souvent obscures : on l'accuse d'avoir détourné des vivres à son profit, de mal faire son travail...En 1600, le voici donc incarcéré, une fois de plus. Et Cervantès convoque Don Quichotte pour prendre sa revanche sur l'ordinaire vie.

Représentons-nous un instant cet homme, Miguel de Cervantès, naguère fier soldat et dramaturge reconnu, qui a désormais la tâche ingrate de lever des impôts. Il sillonne le pays, il se heurte à des portes closes et des visages fermés. Le temps paraît interminable et le ciel pèse de tout son poids sur la plaine où il semble errer. Imaginons ensuite qu'on injurie cet homme au métier bien impopulaire, qu'on lui cherche pouilles et qu'on le jette dans la geôle d'un village aussi morne et hostile que les précédents. A ce tableau peuvent s'ajouter des soucis de ménage, la mort de quelques proches et celle, récente, du roi Philippe II (en 1598). Tant d'épreuves, tant de déceptions, et cette humidité malsaine qui imprègne les murs de sa cellule.

Le salut ne peut venir que de la culture (chers livres, bienheureuse philosophie), de la création artistique conçue comme un rêve démesuré, et aussi de l'amitié (Sancho Pança, fidèle écuyer de Don Quichotte), et de l'amour inaccessible et doux que figure Dulcinée du Tobosco.

Lui, Don Quichotte, ne va pas rançonner ni attrister les habitants du pays. Bien au contraire, il les aide, ils les allège, il les fait rire, même à ses dépens. Il s'est donné pour sainte mission de pratiquer la charité et la justice parmi ses frères humains et d'ainsi faire revenir les temps chevaleresques et advenir la Jérusalem céleste. Dès le départ, la solitude du héros est manifeste puisqu'il se déclare chevalier errant, c'est-à-dire possesseur d’aucune terre : « Voilà pourquoi je vais par ces solitudes et ses déserts, cherchant les aventures, bien déterminé à risquer mon bras et ma vie dans la plus périlleuse que puisse m'envoyer le sort, si c'est au secours des faibles et des affligés. »

Par la noblesse de son aventure dénigrée par ses contemporains, par ses nombreuses vertus qu'il compare à celle du moine chartreux, Don Quichotte est un être à part, étranger en son pays et exilé de son époque. Malgré l'amitié solide de Sancho, malgré la compagnie du cheval nommé Rossinante et malgré la présence de Dulcinée en son cœur, Don Quichotte éprouve un sentiment tragique de solitude du à son idéalisme. Ce chevalier ascétique et inquiet qui se fait le défenseur du Bien, de la sagesse, de l'amour héroïque éveille peu d'échos chez ceux qui le rencontre. Mais il persiste dans sa folie. Les hommes peureux, à la raison étriquée, à l'épais bon sens, ne le détournent pas de sa voie solitaire. Don Quichotte ne s'affronte pas au monde mais à l'absolu. Ce qui le garde et le requiert, c'est la lumière de l'âme. Sa solitude est une solitude qui vielle : « Je suis obligé, suivant l'ordre de la chevalerie errante, où j'ai fait profession, de vivre toujours en alerte et d'être, à toute heure, sentinelle de moi-même.

Il y a ceux qui vivent dans le quotidien et ceux qui avancent dans le Réel. Ces derniers sont le plus souvent seuls. La foule ne les écoute pas, se moque d'eux, leur jette des pierres. Devant eux il n'y a que l'interminable plaine de la Manche. Ou l'Immense.


 

jeudi 11 avril 2013

"Devenez donc les imitateurs de Dieu, comme des enfants bien-aimés; et marchez dans la charité, à l’exemple de Christ, qui nous a aimés, et qui s’est livré lui-même à Dieu pour nous comme une offrande et un sacrifice de bonne odeur."

 La Bible, Ephésiens 5:1-2.




 

samedi 6 avril 2013

« Je veux affirmer que je ne suis pas, et que je n’ai jamais été, pour établir en quoi que ce soit une égalité politique et sociale entre les Blancs et les Noirs. Que je ne suis pas, et que je n’ai jamais été, pour faire des Nègres des électeurs ou des jurés, ni pour leur permettre d’avoir des bureaux ou pour se marier avec des Blancs. J’ajouterai qu’il y a une différence physique entre la race blanche et la race noire qui, je le crois, interdira à jamais à ces deux races de vivre ensemble en terme d’égalité sociale et politique. Et comme ils ne peuvent vivre ainsi, tant que Blancs et Noirs se côtoieront, il devra y avoir une relation de supérieur à inférieur. Et moi, plus que n’importe qui, je suis pour que cette supériorité soit assignée à la race blanche. »

jeudi 4 avril 2013






































- Halte! s'écria Narcisse avec vivacité. Ne sais-tu pas, mon ami, que pour beaucoup de pieux moines ce fut là un exercice préliminaire indispensable? Ne sais-tu pas que l'une des voies les plus courtes qui mènent à la sainteté, c'est la vie débauchée?


dimanche 17 mars 2013




« Mais le latin vivant, le latin de l’Eglise, le latin liturgique, je veux de toute mon âme de « père de jeunesse », comme disait le chanoine Timon-David, que mes pauvres enfants le sachent, qu'ils le savourent, qu'ils en jouissent, qu'ils prient sur de la beauté, selon le mot attribué à saint Pie X (en tout cas la pensée est sienne, sinon l'expression). Parce qu'ils sont pauvres, parce qu'ils sont malheureux, les merveilles de l'art grégorien seraient réservées à d'autres, et à eux interdites ? Cette seule idée me jette dans une colère dont je ne cherche même pas à atténuer la violence. Le seul luxe des pauvres, c'est le luxe en religion ; Chartres est à eux, Reims est à eux, on ne paie rien pour entrer. Le grégorien aussi est à eux, moyennant qu'on le leur apprenne ; c'est cela, servir les pauvres ! Le jeudi-Saint, je lave et je baise, avec un amour inénarrable, les pieds de mes enfants; je n'oserais plus le faire, si je ne leur apprenais pas le latin ; je perdrais le droit à l'honneur d'être à genoux devant eux. Il n'est point en éducation de méthode infaillible. La pâte humaine est lourde, pour ne rien dire des déficiences de l'éducateur. Mais nous tenons pour certain que l'éducation par le grégorien est la meilleure, étant la plus théologale et à la fois la plus propre à tremper les caractères. Nous n'avons pas connu que des succès ; mais des quelque trois ou quatre cents enfants qui sont passés par notre très humble manécanterie, en ceux-là mêmes qui nous ont été cause ensuite des déceptions les plus amères, quelque chose a toujours surnagé dans le naufrage, quelque chose que nous ne saurions définir, ou que nous ne saurions mieux définir qu'en l'appelant une nostalgie du grégorien. Oui, il leur reste cela, oui leur faiblesse est pour toujours pétrie de cette sublimité. Ils ne sauraient plus décliner rosa la rose, mais jamais ne s'éteindra dans leurs entrailles le chant du Regina coeli de Pâques ou du Cibavit du Saint-Sacrement. Inoubliable, inoubliée, la prière grégorienne les garde victorieusement « pèlerins de l'absolu ». Et si, parvenu au terme de notre course, Dieu nous fait la grâce de pouvoir dire : « De tous ceux que vous m'avez confiés, pas un ne s'est perdu, ex iis quos dedisti mihi non perdidi ex eis quernquarn », cette grâce de toutes la plus douce au cœur d'un prêtre qui va paraître devant le Souverain Juge, nous savons que nous en serons éternellement redevable aux puissantes ondes de salut sur lesquelles le chant grégorien porte les âmes jusqu'au seuil du Paradis. »
"La guerre est la plus forte rencontre des peuples. Alors que commerce et circulation, compétitions et congrès ne font se joindre que les pointes avancées, la guerre engage l'équipe au complet, avec un objectif seul et unique : l'ennemi. Quels que soient les problèmes et les idées qui agitent le monde, toujours leur sort se décida par la confrontation dans le sang. Certes toute liberté, toute grandeur et toute culture sont issues du silence de l'idée, mais seules les guerres ont pu les maintenir, les propager ou les perdre. La guerre seule a fait des grandes religions l'apanage de la terre entière, a fait surgir au jour, depuis leurs racines obscures, les races les plus capables, a fait d'innombrables esclaves des hommes libres. La guerre n'est pas instituée par l'homme, pas plus que l'instinct sexuel ; elle est loi de nature, c'est pourquoi nous ne pourrons jamais nous soustraire à son empire. Nous ne saurions la nier, sous peine d'être engloutis par elle. Notre époque montre une forte tendance au pacifisme. Ce courant émane de deux sources, l'idéalisme et la peur du sang. L'un refuse la guerre par amour des hommes, et l'autre parce qu'il a peur. Le premier est de la trempe des martyrs. C'est un soldat de l'idée ; il est courageux : on ne peut lui refuser l'estime. Pour lui, l'humanité vaut plus que la nation. Il croit que les peuples, dans leur furie, ne font que frapper l'ennemi de plaies sanglantes. Et que lorsque les armes ferraillent, on cesse d'oeuvrer à la tour que nous voulons pousser jusqu'au ciel. Alors il s'arc-boute entre les vagues sanglantes et se fait fracasser par elles. Pour l'autre, sa personne est le bien le plus sacré ; par conséquent il fuit le combat, ou le redoute. C'est le pacifiste qui fréquente les matchs de boxe. il s'entend revêtir sa faiblesse de mille manteaux chatoyants - celui du martyr de préférence -, et bon nombre d'entre eux ne sont que trop séduisants. Si l'esprit d'un peuple entier pousse dans ce sens, c'est le tocsin de la ruine prochaine. Une civilisation peut être aussi supérieure qu'elle veut - si le nerf viril se détend, ce n'est plus qu'un colosse aux pieds d'argile. Plus imposant l'édifice, plus effroyable sera le chute."



samedi 16 mars 2013

Thorfin le Pourfendeur




"Les empereurs s'alarmèrent de cette évolution qui sapait le pouvoir financier et militaire de leur administration. Mais leur réaction fut sans portée parce qu'elle ne s'attaquait pas à la racine du mal. La contrainte et la répression auxquelles ils recoururent ne pouvaient renverser la tendance à la désintégration sociale qui, au contraire, provenait précisément de trop de contrainte et de répression. Aucun Romain ne comprit ce fait que le processus découlait de l'intervention du gouvernement dans les prix et de la dégradation de la monnaie. Vainement les empereurs promulguèrent-ils des édits contre le citadin qui « relicta civitate rus habitere maluerit » (qui, abandonnant la cité, préférerait habiter la campagne). Le système de la leiturgia, c'est-à-dire des services dont devaient se charger les citoyens fortunés ne fit qu'accélérer le recul de la division du travail. Les lois concernant les obligations des armateurs, les navicularii, n'eurent pas plus de succès pour empêcher le déclin de la navigation, que n'en eurent les lois sur les grains pour arrêter l'amenuisement du ravitaillement des villes en produits agricoles.

La merveilleuse civilisation de l'Antiquité périt ainsi parce qu'elle n'ajusta pas son code moral et son système juridique aux exigences de l'économie de marché. Un ordre social est voué à disparaître si les activités que requiert son fonctionnement sont bannies par les habitudes morales, déclarées illégales par les lois du pays, et poursuivies comme criminelles par les tribunaux et la police. L'Empire romain s'effondra parce qu'il n'avait pas la mentalité du libéralisme et de l'entreprise libre. Les méthodes de l'interventionnisme et leur corollaire politique, le Führerprinzip, frappèrent de décomposition le puissant empire, comme ils le feront nécessairement dans n'importe quelle entité sociale, jusqu'à la désintégrer et l'anéantir."

mardi 12 mars 2013

 

" L'Etat traditionnel est organique, mais non totalitaire. Il est différencié et articulé, il admet des zones d'autonomie partielle. Il coordonne et fait participer à une unité supérieure des forces dont il reconnaît cependant la liberté. Précisément parce qu'il est fort, il n'a pas besoin de recourir à une centralisation mécanique : celle-ci n'est réclamée que lorsqu'il faut contrôler une masse informe et atomique d'individus et de volontés, ce qui fait, d'ailleurs, que le désordre ne pourra jamais être vraiment éliminé, mais seulement contenu provisoirement. Pour reprendre une heureuse expression de Walter Heinrich, l'Etat authentique est « omnia potens », non « omnia facens », c'est-à-dire qu'il détient au centre un pouvoir absolu qu'il peut et doit faire valoir sans entraves en cas de nécessité ou dans les décisions ultimes, au-delà du fétichisme de l' « Etat de droit » ; mais il n'intervient pas partout, il ne se substitue pas à tout, il ne vise pas à imposer une vie de caserne (au sens négatif), ni un conformisme niveleur, au lieu de la reconnaissance libre et du loyalisme ; il ne procède pas à des interventions impertinentes et imbéciles du domaine public et de l' « étatique » dans le domaine privé. L'image traditionnelle, c'est celle d'une gravitation naturelle de secteurs et d'unités partielles autour d'un centre qui commande sans contraindre, agit par son prestige, par une autorité qui, certes, peut avoir recours à la force, mais s'en abstient le plus possible. La preuve de la force effective d'un Etat est donné par la mesure de la marge qu'il peut concéder à une décentralisation partielle et rationnelle. L'ingérence systématique de l'Etat ne peut être un principe que dans le socialisme d'Etat technocratique et matérialiste. "

samedi 2 mars 2013

Sa femme et ses gosses étaient partis passer l'après-midi chez ses beaux-parents; nous voilà donc assis dans sa cuisine, à boire du soda, tandis que ce petit bonhomme noueux, avec les airs supérieurs d'un voyou des rues, n'arrête pas de ricaner dédaigneusement de tout ce que dit Ira. Comment il explique son retournement de veste?
"Je ne savais rien de rien, à l'époque, je confondais la merde avec le cirage, je savais pas de quoi je parlais." Puis s'adressa à moi:
"Ecoute pas ce qu'il te raconte, petit. Tu vis en Amérique. C'est le pays le plus formidable de monde, le système le plus formidable du monde. Il y a des gens qui se font chier dessus, d'acoord. Tu crois qu'il y en a pas un Union Soviétique? Il te dit que dans le capitalisme, les loups se mangent entre eux? C'est quoi la vie, sinon un système où les loups se mangent entre eux? Notre système est en prise directe avec la vie. Et c'est pour ça qu'il marche.
Ecoute tout ce que disent les communistes sur le capitalisme, c'est vrai. Et tout ce que disent les capitalistes sur le communisme, c'est vrai. Seulement la différence, c'est que notre système marche parce qu'il est fondé sur une vérité: l'égoisme humain; le leur ne marche pas parce qu'il est fondé sur un conte de fées: la fraternité humaine. Il est tellement dingue leur conte de fées, qu'ils sont obligés de te coller les gens en Sibérie pour qu'ils y croient. Pour qu'ils y croient, les gens, à cette histoire de fraternité, il faut contrôler la moindre de leur pensées, ou alors les fusiller. Pendant ce temps-là, en Amérique, en Europe, les communistes continuent à raconter leur conte de fées alors qu'ils savent très bien ce qu'il se passe là-bas. Bon, bien sûr, pendant un temps on ne sait pas. Mais qu'est-ce qu'on ne sait pas?
On connaît l'être humain. Autant dire qu'on sait tout. On sait que c'est une histoire à dormir debout. Quand t'es jeune, bon, passe encore. Vingt ans, vingt-et-un, vingt-deux ans, soit. Mais au-delà? Je ne vois pas comment une personne d'une intelligence normale peut avaler les contes de fées communistes: "On va faire des trucs formidables." Mais enfin, quoi, on connaît son frère. On sait bien que c'est un enfoiré. On connaît son ami. C'est un demi-enfoiré. Et nous aussi, on est des demi-enfoirés. Alors comment veut-tu que ça soit formidable?
C'est pas la peine d'être cynique, ni même sceptique, il suffit d'avoir des capacités d'observation ordinaires pour comprendre que CA NE TIENT PAS DEBOUT.

"Tu veut venir visiter mon usine capitaliste, voir comment on fabrique un matelas à la manière capitaliste? Viens chez nous, tu parleras aux vrais travailleurs. Ce type-là, c'est une vedette de la radio, c'est une vedette à qui tu parles, pas à un ouvrier. Mais si, Ira, tu es devenu une star comme Jack Benny - qu'est-ce que tu y connais, bon Dieu, au monde du travail? Qu'il vienne dans mon usine, ce jeune, il va voir comment on fabrique un matelas; il va voir le soin que ça demande; il va voir comment il me faut superviser tout le processus pour qu'il me bousille pas mes matelas. Il va voir ce que ça veut dire d'être l'abominable propriétaire des moyens de production. Ca veut dire se casser le cul vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Les ouvriers, à cinq heures, ils rentrent chez eux. Pas moi. Je suis au boulot jusqu'a minuit. Je rentre, et j'arrive pas à dormir parce que je fait les comptes dans ma tête; et à six heures du matin, je suis de nouveau sur place pour ouvrir. Le laisse pas te bourrer la caisse avec ses idées communistes, petit. C'est rien que des mensonges.
Fais de l'argent. Ca ment pas, l'argent. L'argent c'est la manière démocratique de marquer des points. Fais-toi de l'argent, et puis après, s'il faut vraiment, alors prêche la fraternité humaine.







mercredi 20 février 2013



Hier soir, un millionnaire crétin, qui ne secouru jamais personne, a perdu mille louis au cercle, au moment même où quarante pauvres filles que cet argent eût sauvées tombaient de faim dans l’irréméable vortex du putanat ; et la délicieuse vicomtesse que tout Paris connaît si bien a exhibé ses tétons les plus authentiques dans une robe de couleur de la quatrième lune de Jupiter, dont le prix aurait nourri, pendant un mois, quatre-vingts vieillards et cent vingt enfant !
Tant que ces choses seront vues sous la coupole des impassibles constellations, et racontées avec attendrissement par la gueusaille des journaux, il y aura –en dépit de tous les bavardages ressassés et de toutes les exhortations salopes, – une gifle absolue sur la face de la Justice, et, -dans les âmes dépossédées de l’espérance d’une vie future, – un besoin toujours grandissant d’écraser le genre humain.
- Ah ! vous enseignez qu’on est sur terre pour s’amuser. Eh bien ! nous allons nous amuser, nous autres, les crevants de faim et les porte-loques. Vous ne regardez jamais ceux qui pleurent et ne pensez qu’à vous divertir. Mais ceux qui pleurent en vous regardant, depuis des milliers d’années, vont enfin se divertir à leur tour et, – puisque la Justice est décidément absente, – ils vont, du moins, en inaugurer le simulacre, en vous faisant servir à leurs divertissements.
Puisque nous sommes des criminels et des damnés, nous allons nous promouvoir nous-mêmes à la dignité de parfaits démons, pour vous exterminer ineffablement.
Désormais, il n’y aura plus de prières marmonnées au coin des rues, par des grelotteux affamés, sur votre passage. Il n’y aura plus de revendications ni de récriminations amères. C’est fini, tout cela. Nous allons devenir silencieux…
Vous garderez l’argent, le pain, le vin, les arbres et les fleurs. Vous garderez toutes les joies de la vie et l’inaltérable sérénité de vos consciences. Nous ne réclamerons plus rien, nous ne désirerons plus rien de toutes ces choses que nous avons désirées et réclamées en vain, pendant tant de siècles. Notre désespoir complet promulgue, dès maintenant, contre nous-mêmes, la définitive prescription qui vous les adjuge.
Seulement, défiez-vous !… Nous gardons le feu, en vous suppliant de n’être pas trop surpris d’une fricassée prochaine. Vos palais et vos hôtels flamberont très bien, quand il nous plaira, car nous avons attentivement écouté les leçons de vos professeurs de chimie et nous avons inventé de petits engins qui vous émerveilleront.
Quant à vos personnes, elles s’arrangeront pour acclimater leur dernier soupir sous la semelle sans talon de nos savates éculées, à quelques centaines de pas de vos intestins fumants ; et nous trouverons, peut-être, un assez grand nombre de cochons et de chiens errants, pour consoler d’un peu d’amour vos chastes compagnes et les vierges très innocentes que vous avez engendrées de vos reins précieux…
Après cela, si l’existence de Dieu n’est pas la parfaite blague que l’exemple de vos vertus nous prédispose à conjecturer, qu’Il nous examine à son tour, qu’Il nous damne sans remède, et que tout finisse ! L’enfer ne sera pas, sans doute, plus atroce que la vie que vous nous avez faite.
Mais, dans ce cas, Il sera forcé de confesser devant tous ses anges, que nous aurons été ses instruments pour vous consumer, car Il doit en avoir assez de vos visages ! Il doit être, au moins, aussi dégoûté que nous, cet hypothétique Seigneur ; il vous a, sans doute, vomi cent fois, et si vous subsistez, c’est qu’apparemment il a l’habitude de retourner à ses vomissements !
Tel est le cantique des modernes pauvres, à qui les heures de la terre, -non satisfaits de tout posséder, – ont imprudemment arraché la croyance en Dieu. C’est le Stabat des désespérés !
Ils se sont tenus debout, au pied de la Croix, depuis la sanglante Messe du grand Vendredi, – au milieu des ténèbres, des puanteurs, des dérélictions, des épines, des clous, des larmes et des agonis. Pendant des générations, ils ont chuchoté d’éperdues prières à l’oreille de l’Hostie divine, et – tout à coup -, ont leur dévoile, d’un jet de science électrique, ce gibet poudreux où la dent des bêtes a dévoré leur Rédempteur… Zut ! alors, ils vont s’amuser !

mardi 5 février 2013




« Deux courants en apparence opposés, pareillement néfastes dans leurs effets, réunis enfin dans leurs résultats, dominent actuellement nos établissements d’enseignement : la tendance à l’extension, à l’élargissement maximal de la culture, et la tendance à la réduction, à l’affaiblissement de la culture elle-même. La culture, pour diverses raisons, doit être étendue aux milieux les plus vastes, voilà ce qu’exige une tendance. L’autre invite au contraire la culture à abdiquer ses ambitions les plus hautes, les plus nobles, les plus sublimes, et à se mettre avec modestie au service de n’importe quelle autre forme de vie, l’État par exemple. Je crois avoir remarqué de quel côté est le plus net l’appel à l’extension. Cette extension est l’un des dogmes d’économie politique les plus chers au temps présent. Autant de connaissance et de culture que possible, – donc autant de production et de besoins que possible, – donc autant de bonheur que possible : – voilà à peu près la formule. Nous avons ici comme but et fin de la culture l’utilité ou plus exactement le profit, le plus gros gain d’argent possible. Cette direction pourrait à peu près définir la culture comme le discernement grâce auquel on se tient “au sommet de son époque”, grâce auquel on connaît tous les chemins qui permettent le plus facilement de gagner de l’argent, grâce auquel on possède tous les moyens par lesquels passe le commerce entre les hommes et entre les peuples. La véritable tâche de la culture serait alors de créer des hommes aussi “courants” que possible, un peu comme on parle d’une “monnaie courante”. Plus il y aurait d’hommes courants, plus un peuple serait heureux ; et le dessein des institutions d’enseignement contemporaines ne pourrait être justement que de faire progresser chacun jusqu’au point où sa nature l’appelle à devenir “courant”, de former chacun de telle sorte que de sa mesure de connaissance et de savoir il tire la plus grande mesure possible de bonheur et de profit. Chacun devrait pouvoir se taxer avec précision, chacun devrait savoir combien il peut exiger de la vie. “L’union de l’intelligence et de la propriété” que l’on pose en principe dans cette conception du monde prend valeur d’exigence morale. On en vient à haïr toute culture qui rend solitaire, qui propose des fins au-delà de l’argent et du gain, qui demande beaucoup de temps ; on a coutume d’écarter ces tendances divergentes en les appelant “égoïsme supérieur” ou “épicurisme immoral de la culture”. La morale qui est ici en vigueur exige assurément quelque chose d’inverse, en l’espèce une culture rapide, pour que l’on puisse rapidement devenir un être qui gagne de l’argent, mais aussi une culture assez approfondie pour que l’on puisse devenir un être qui gagne beaucoup d’argent. On ne permet la culture à l’homme qu’en proportion de ce que demande l’intérêt du gain, mais c’est aussi dans la même proportion qu’on l’exige de lui. […]

On a coutume dans tous les cercles savants de se chuchoter à l’oreille quelque chose de cette chanson, je veux dire ce fait partout répandu : l’utilisation, tant souhaitée de nos jours, du savant au service de sa discipline, rend la culture du savant de plus en plus aléatoire et invraisemblable. Car le champ d’étude des sciences est aujourd’hui si étendu que celui qui, avec des dispositions bonnes mais non exceptionnelles, veut y produire quelque chose se consacrera à une spécialité très particulière et n’aura aucun souci de toutes les autres. Si dans sa spécialité il est au-dessus du vulgus, il en fait partie pour tout le reste, c’est-à-dire pour tout ce qui est important. Ainsi un savant exclusivement spécialisé ressemble à l’ouvrier d’usine qui toute sa vie ne fait rien d’autre que fabriquer certaine vis ou certaine poignée pour un outil ou une machine déterminés, tâche dans laquelle il atteint, il faut le dire, à une incroyable virtuosité. En Allemagne où l’on s’entend à recouvrir des faits aussi douloureux d’un glorieux manteau de pensée, on admire comme un phénomène moral cette étroite spécialisation de nos savants et leur éloignement toujours plus grand de la vraie culture : la “fidélité dans les petites choses”, la “fidélité du charretier” devient un thème d’apparat, l’inculture hors des limites de la discipline est proposée comme signe d’une noble modération.

(...)

Un État désire une extension maximale de la culture pour garantir sa propre existence, parce qu’il se sent toujours assez fort pour tenir sous son joug la culture la plus violemment déchaînée et a trouvé sa justification dès lors que la culture la plus étendue de ses fonctionnaires et de ses armées lui apporte en fin de compte un profit à lui, l’État, dans sa rivalité avec les autres États.

(...)

Cette conception fait naître un grand et même un énorme danger : la grande masse va un jour sauter le degré intermédiaire et se jeter sans détour sur le bonheur terrestre. C’est ce qu’on appelle de nos jours la “question sociale”. Car la masse pourrait avoir l’impression que la culture distribuée à la majorité des hommes n’est qu’un moyen pour une minorité d’obtenir le bonheur sur terre : la culture “aussi universelle que possible” affaiblit à ce point la culture qu’elle ne peut plus fonder aucun privilège ni aucun respect. La culture la plus “universelle” c’est justement la barbarie. »

vendredi 1 février 2013

Je suis un génie... et je t'emmerde




C’est en lisant ce matin cet énième article sur les surdoués que j’ai été soudain prit de l’envie subite d’écrire ce texte. Et plus particulièrement en lisant les commentaires qui suivent. Commentaires amères souvent, qui nous reproche de ne pas être des Mozart, ou ricaneurs, qui nous explique que nous nous sommes auto-proclamé, avec bien entendu le cortège de fantasme que sous-entend la mention d’un QI élevé. En effet la majorité des gens rattachent ce chiffre de 130 ou plus à la réussite sociale, du type qui illustre l’article -et qui démontre surtout que l’auteur de l’article n’a strictement rien compris au sujet- ou, comme aujourd’hui dans le cadre de l’Enfant Roi, rallie les partisans des enfants incompris. De là tous les cancres de se demander si au fond ils ne seraient pas en réalité des génies qui s’ignorent, des proscrits du système scolaire. Et comme toujours, des quantités de sites, de magazine, de gourou, de psys, de proposer des tests afin de satisfaire en réalité notre seule vanité. La crédulité est, avec la bêtise, la chose la plus permanente chez l’individu. D’une part même un QI de 130 et plus ne réussira pas forcément ces tests, d’autre part ils ne décrivent en fait absolument pas la réalité que nous autres génies vivons au quotidien.

Cette réalité, certains d’entre vous la vive immédiatement alors que les mots « génie » et « nous » commence déjà à les agacer. Cet agacement nous le connaissons parfaitement, nous le vivons ou l’avons vécu tous les jours de notre vie, parce que nous le subissons, nous les 2,2% de la population humaine depuis que nous sommes enfants.

C’est même le premier traits je crois qui nous distingue, nous sommes différents, certes, mais en plus notre différence, notre handicap en réalité, ne nous apporte pas la pitié, la commisération, ou même la sympathie, mais l’envie, la peur, la haine. Ou, et c’est aussi le paradoxe, la fascination. Les gens intelligents sont attirants, mais les génies…

Voilà, à partir de là, et cela posé, je sais que parmi mes lecteurs j’ai déjà effectué un tri sélectif. Ceux qui ont commencé à se faire à cette idée que l’auteur de ces lignes fait partis des 2,2% et ceux qui continuent de s’agacer. Il y aussi les autres membres de notre club fermé, mais ceux là je leur parle pas, je sais qu’en ce moment ils rigolent. Aussi, pour éviter aux agacés de me poser plus tard la question : oui mais qu’est-ce ca veut dire intelligent ? Et digresser à la suite à coup de contresens et de phrases mal écrites mais parfaitement orthographiées, je vais tout de suite répondre.

Qu’est-ce que ca veut dire intelligent ? C’est quoi un génie ? Je sais pas.

Comme tout le monde j’ai connu des gens très intelligent qui étaient de parfaits connards. Comme tout le monde j’ai croisé des membres du club qui était totalement imbuvables. Je l’ai été moi-même, et pas seulement sur papier, et pendant longtemps. D’ailleurs personnellement les gens très intelligents finissent pour la plus part du temps par me fatiguer. En tant que formateur j’avais même tendance à les mettre petit, ou à les ignorer, les autres m’intéressaient plus. Sans doute parce qu’au sein de notre club très privé, il y en a un encore plus privé, ceux qui ont développé leurs émotions, qui ont utilisé cette extraordinaire capacité, cette hypersensibilité, pour s’ouvrir et non grimper sur leur trône.

Personnellement je déteste les tests psychotechniques. On nous propose de trouver la séquence qui sépare 1,5,8,10 (et que je viens d’inventer c’est dire si c’est compliqué) alors qu’il faudrait plutôt nous demander de chercher l’intrus dans cette séquence ci : 108,42,0,13.

Vous voulez la réponse ? 108 c’est le nombre de réincarnation nécessaire pour atteindre le Nirvana, 42 c’est le chiffre que donne le super ordinateur du Guide du Routard galactique à la question « qu’elle est le sens de la vie ? ». C’est-à-dire que comme zéro, 108 et 42 sont des symboles d’absolu. Alors que 13 est un chiffre symbole lié à la lune, une planète, un calendrier, une couleur.

Voilà, maintenant vous savez comment c’est de réfléchir par arborescence.

Pour moi qui ai eu l’idée de cette séquence c’est normal et évident, un des 2,2% ayant comme moi une inclinaison plus pour les lettres que les chiffres, serait capable de le deviner d’instinct. Car c’est là un autre aspect de nos personnalités, nous n’avons pas seulement l’intelligence dans la tête, ni forcément bien pleine, ni surtout pas ordonnée, mais au bout des doigts. Cette intelligence-là est sensible. Et si je mets des italiques ici c’est pour que vous distinguiez bien la différence. Je ne parle pas de la sensibilité des jeunes filles, ni des poètes, des artistes, je parle d’une sensibilité affleurante à la vie et au monde qui nous entoure. Et qui nous rends, la plus part du temps, émotionnellement ingérables.

C‘est pas faire un cadeau à un enfant du club que de le traiter en enfant roi. Croyez-moi. Ce n’est même pas forcément un cadeau que de lui faire passer les fameux tests qui exciteront comme tous les autres sa vanité et sa bêtise. Surtout que là vous donnez du pouvoir à un monstre. Lui, il ne se contentera pas seulement de faire le malin, il écrasera les autres, de toutes les manières possibles et avec des moyens prodigieux que vous n’avez pas. Pas plus qu’il n’est d’ailleurs simple de nous élever. Les parents aussi peuvent se sentir en concurrence, ou dépassés. C’est épuisant d’avoir ce machin-là à la maison. Qui se souvient de tout, sent tout, essaye de tout comprendre, et n’est pas foutu de lasser ses lacets correctement à l’âge de 8 ans…

J’ai commencé à parler d’une manière articulé à huit mois, à un an, à mon baptême je tapais un scandale au pasteur en hurlant « mais qu’est-ce qu’il fait ? Mais y mouille ! mais y mouille ! ». Le mercredi, je me plantais devant la télé à regarder l’assemblé nationale pour comprendre ce qu’ils disaient et j’adorais la politique, j’avais 5 ans. Mais j’ai mit plus d’un an à marcher et quand je me ramassais, je ne mettais pas les mains pour me protéger. Je tombais tout droit, personne n’avait informé mes mains qu’elles pouvaient éventuellement servir. A tel point que ma mère m’a présenté à un pédopsy. Ma mère adorait me faire jouer à Trivial Pursuit ou me mettre devant un jeu télévisé parce que je répondais à toutes les questions ou presque. A force j’avais mémorisé les questions du Trivial, plus de 300… et toutes les réponses qui m’intéressait. Quand on me collait dans un vidéoclub pour choisir un film ca devenait vite un cauchemar. Non seulement j’avais déjà vu les deux tiers du stock, mais je m’en souvenais. Des acteurs, de l’histoire… Parlez-moi d’un sujet qui m’intéresse et vous pouvez m’appeler Google. Et de la même manière, mon cerveau vous mettra des liens dans tous les sens autour du thème. C’est parfois difficile à suivre, comme me le faisait remarquer un ami. Mais je suis au RSA, je n’arrive pas à m’intégrer dans une cuisine, ni d’ailleurs n’ai jamais réussi à m’intégrer dans aucun milieu ou entreprise où j’ai pu être. Je dépasse, quoiqu’il arrive.

En France, au pays du Cogito, de la grammaire mathématique, des démonstrations, et des disputations, c’est encore plus difficile. L’école de l’élite de Condorcet ne se plait pas devant les petits marioles qui n’apprennent rien mais qui savent tout. Il faut démontrer de son savoir, il faut être comptable de son intelligence, dûment estampillé, certifié, prouvé, et paf la cocarde du plus beau bestiau. Et à l’identique dans la vie courante, il faut démontrer, prouver, qu’on peut faire tel travail, qu’on peut comprendre telle situation. Qu’on est capable. Et, en plus, on perd un temps considérable avec des petits coqs qui veulent nous prouver par a+b soit qu’on est en réalité comme tout le monde, soit qu’ils sont aussi, sinon bien plus intelligents que nous.

Mais peu importe la France.

La réalité elle est dites par cette dame dans l’article. « "Je suis fine, je comprends très vite ce que les gens sont sans qu'eux-mêmes le sachent", dit-elle, doutant cependant de conserver ce poste longtemps. "Rien ne dure, à cause du décalage que je ressens entre moi et les autres", confie-t-elle. » Et j’en reviens ici à ce que je disais sur l’intelligence au bout des doigts. C’est gênant d’être comme ca, pour soi, pour les autres. C’est difficile de rester aimable ou souriant à côté de quelqu’un qui ne vous nourris pas. C’est compliqué d’expliquer, ou pas à une personne qu’elle est pour vous transparente, que vous l’aimiez ou pas. C’est encore plus compliqué en plus quand elle vous touche. C’est effrayant de se retrouver face à une personne qui vous comprends de A à Z et qui en même temps qu’elle suit votre conversation, regarde la télé, lit un livre, peut vous expliquer ce qui s’y passe, tout en pensant à autre chose, et même vous réciter de tête la conversation que vous venez d’avoir. C’est intimidant d’apprendre à quelqu’un quelque chose que vous avez mis deux ans à maitriser et qu’il reproduit en deux jours. Complexant même. Et ca complexe de complexer les autres.

Alors on se prend la tête énorme. Ca tombe bien, on a un penchant naturel, une constitution de notre cortex qui nous y prédispose, mieux, qui nous y invite. Et d’une chose simple évidente pour tout le monde, on fait un sac de nœud formidable. Par exemple moi en math, avec leur machin abstrait d’ensembles, qui avait peur de croiser les lignes de peur que le prof comprenne ça comme une rature, ou ajoutant des commentaires à un QCM... Et mieux encore que de se prendre la tête, plus formidable, on fini même pas avoir peur de ces dons.

C’est extravagant quand même de passer deux jours avec un type, un type qui ne veut surtout pas qu’on le comprenne ou vous donner la moindre information. Un type qui a l’habitude de mentir et de tricher, par métier, par habitude, ou par besoin. Et qu’on déchiffre quand même. Comment expliquer qu’en regardant une photo, une photo de quelqu’un qu’on connait à peine, on peut si bien la deviner qu’elle fond en larme quand on finit par lui dire ce qu’on a vu. C’est pas une mince responsabilité. Si tant est qu’on arrive en plus à se sentir responsable. Et c’est surtout un truc qu’aucun de ces foutus tests ne pourra jamais vous expliquer. D’ailleurs même les psys ont du mal. Quand ils pannent pas complètement dans la semoule. Ajoutez-y un sale moment, une dépression et vous avez tôt fait de prendre votre handicap pour un super pouvoir. D’autant que sans être forcément sujet à la dépression vous êtes parfois vraiment border line. Et hop on vous explique que vous êtes bipolaire, dépressif, voir schizo… Et comme c’est vous contre le monde entier, en général, vous faites oui chef et par ici les neuroleptiques, les somnifères, les anxiolytiques…

Mais bien entendu c’est pas forcément grosse malheur pour tout le monde, ni toujours. Certains d’entre nous avons plus de chance que d’autres, comme vous tous. Et même on apprend à grandir avec, à s’accepter. Plus rarement à s’en servir réellement. En tout cas jamais au complet de notre potentiel. Sinon ca se saurait. Les pays seraient bien dirigé, l’art serait autre chose qu’une galerie marchande, il n’y aurait que des bons films et l’humanité seraient déjà sur Zébulon, planète qu’elle aurait inventé, à deux pas de Jupiter. Tout ca bien entendu après avoir été anéanti 11 fois.

Hitler, et pas seulement Einstein, aussi abominable ca puisse nous apparaitre, appartenait probablement à notre club… Hypersensibilité, imagination délirante, sens innée de la guerre mais incompétence stratégique, don du verbe, don d’orateur, autodidacte mais peintre raté, chef d’état minable mais visionnaire… autant de signe qui ne trompe hélas pas. Mais après tout nous sommes aussi le produit des circonstances, de notre environnement et de notre éducation. Hitler justement, l’Enfant Roi.

Toujours est-il que nos prédispositions peuvent également nous secourir. Que l’on trouve un objet où s’investir, une nouvelle substance de laquelle se nourrir, et nous voilà en route. Je ne suis pas devenu cultivé parce que l’école m’intéressait mais parce que j’avais remarqué que ca impressionnait les filles. J’ai appris l’anglais à mon corps défendant parce que j’ai le goût pour les langues étrangères et les prononciations pas de chez nous. Je n’ai pas appris à écrire parce que je rêvais de devenir écrivain ou que j’avais lu un million de livre mais faute d’être cinéaste, acteur et aventurier à neuf ans… Et puis au fil du temps, à mesure qu’on s’accepte on finit par rencontrer d’autres membres du club. Plus aguerris, ou plus sages que nous, et qui nous apprenne à sinon nous maitriser, du moins à faire quelque chose de nos possibilités, en commençant par les accepter. On vieilli, alors qu’on devrait avoir moins de mémoire, on en a plus, ou du moins on finit par comprendre comment elle fonctionne et à nous servir de l’outil plutôt que d’en être victime. La vie des zèbres, comme nous appellent une maman surdouée, mère de surdoué, n’est pas facile mais n’est pas forcément un cauchemar. D’ailleurs ni un comportement imbuvable, ni une hyperactivité, ni une scolarité désastreuse n’est non plus signifiant. C’est un ensemble, et dans cet ensemble, ce club, nous sommes tous différents. Certains parviennent à de hautes fonctions, et d’autres n’y arrivent jamais. Il n’y a pas de règles, puisqu’en réalité nous n’en suivons aucune.

Mais en attendant, et pour en revenir à mon intitulé, de la part de tous les membres du club des 2,2% à tous ceux qui nous ont mit ou nous mettent des bâtons dans les roues. A tous ceux qui nous regardent de haut, alors qu’ils sont tout en bas. A tous ceux qui nous expliquent que nous sommes pervers, mythomanes, prétentieux, narcissique. Tous les gens « psychologues » ou tous les psychologues qui ne sont après tout que des gens, permettez-moi de vous dire merde. Vous nous pourrissez la vie au quotidien parce qu’on a un bras en plus au lieu de l’avoir en moins, et vous pensez que c’est une injustice. Ca tombe bien, nous aussi, et ca nous fait chier autant que vous. Mais si la justice était de ce monde ca se saurait. Edison, que vous prenez tous pour un génie disait : « le génie c’est 10% d’inspiration et 90% de transpiration » alors que c’est exactement l’inverse. N’ayez pas peur, on ne vous piquera pas votre place, on ne vous volera pas votre femme, on ne gagnera pas au loto à votre place, c’est scientifiquement prouvé, les cons sont majoritaires, vous aurez toujours le dernier mot. Foutez nous juste la paix et apprenez à vivre avec.

Lien de l'article: " http://www.lemonde.fr/vous/article/2012/05/14/les-maux-inavoues-des-adultes-surdoues_1700385_3238.html?fb_action_ids=10200402067363122&fb_action_types=og.recommends&fb_source=other_multiline&action_object_map=%7B%2210200402067363122%22%3A10150955319879252%7D&action_type_map=%7B%2210200402067363122%22%3A%22og.recommends%22%7D&action_ref_map=[] "

samedi 19 janvier 2013

«Il n’y a pour la femme – créature temporairement, provisoirement inférieure, que deux manières d’être : la maternité la plus auguste et la qualité d’un instrument de plaisir, l’amour pur ou l’amour impur. En d’autres termes, la Sainteté ou la Prostitution ; Marie-Magdeleine avant ou Marie-Magdeleine après. Entre les deux, il n’y a que l’Honnête femme, c’est-à-dire la femelle du Bourgeois, du réprouvé absolu que nul holocauste ne peut racheter. Une sainte peut tomber dans la boue et une prostituée monter dans la lumière, mais l’affreuse pécore sans entrailles et sans cerveau qu’on appelle une honnête femme et qui refusa autrefois l’hospitalité de Bethléem à l’Enfant Dieu, est dans une impuissance éternelle de s’évader de son néant par la chute ou par l’ascension»


Crucem Sanctam Subiit

mercredi 16 janvier 2013

« Pesez toutes les paroles de la Sibylle : quel résumé clair et complet de ce que la foi chrétienne doit croire de Jésus-Christ ! Elle n'a rien oublié, ni sa divinité, ni son humanité, ni son arrivée pour les deux jugements ; le premier dans lequel il a été injustement condamné aux tourments de la passion, le second dans lequel il viendra dans sa majesté juger le monde suivant les lois de la justice. Elle fait mention et de sa descente aux enfers et de la gloire de la résurrection ; et en cela, elle s'éléve aux dessus des prophètes, que dis-je ? au-dessus des évangélistes eux-mêmes, qui de la descente aux enfers, ne disent presque rien. »